L'épuisement & la ruine se sont abattus sur les sols envahis. Les cités & les villages sont dépouillés successivement, les palais & les fermes sont ravagés, les potagers & les caves pillés. Des faits de même nature ont lieu partout & chagrinent les beaux esprits. Des citadins & des campagnards maltraités attendent avec impatience que l'heure de la justice sonne. Mais, pendant ce temps, les fanfares jouent les hymnes nationaux avec plus de ferveur que jamais.
- La bataille de France -
Depuis Nantes où ils avaient crânement débarqué cet été, les Hussards du troisième corps royal des Pays-Bas, ont décampé pour être transbahutés en Normandie, en soutien d'une grande armée, afin de prendre Rouen. Pour les Français, les Américains & leurs serviteurs les Hollandais, ne sont pas dignes d'être respectés en tant que soldats réguliers. En conséquence, les prisonniers n'ont aucun égard de la part du troupier de la République, lorsqu'ils ne sont pas ignominieusement fusillés en rase campagne. Henry Dunand, retiré dans une misère incroyable au fin fond du canton d'Appenzell écrit, horrifié, son désespoir. Mais revenons à Rouen qui est prise, après de durs combats, auxquels les Hollandais ne s'attendaient pas. Ces derniers doivent d'ailleurs comprendre que la route de Paris est barrée & qu'ils ne pourront point surprendre leurs adversaires de ce côté-là. Il est temps d'aller voir ce qu'il se trame autour de Bordeaux, où une grande confrontation s'engage entre les intrépides Français & les bravaches Ibères.
- Le siège de Bordeaux -
Autour de Bordeaux, au bord du bassin d'Arcachon, dans la forêt des Landes & en amont de la Garonne jusque Toulouse, un large front se dessine sur les cartes d'état-major. Mais, si la menace apparaît sérieuse dans les bureaux, sur le terrain, il n'y a pas d'illusion à se faire, car les Français y accueillent les Espagnols avec un enthousiasme véhément & un armement infiniment plus efficace. A court de cartouche & de courage, le cinquième corps espagnol doit faire retraite. Isolée, la première armée est bloquée par la garnison qui prend le rôle de l'enclume, pour être ensuite broyée par l'armée du général Billot, qui fait office de marteau. Plus à l'Est, Toulouse est libérée, lorsque la pauvre troupe espagnole subit une pleine déroute & engage son repli vers les Pyrénées, afin de ne pas subir un anéantissement complet. Les routes sont jonchées de morts & de blessés agonisants, de charrettes en feu & de fusils abandonnés. L'armée d'Alphonse XII ne fait vraiment pas le poids face aux soldats républicains & aux canons en acier de Bange de 90 mm à chargement par la culasse.
- Le front de Galicie s'embourbe -
Ce que certains esprits redoutaient - ou souhaitaient ! - se vérifie dans le temps, à savoir un enlisement du front entre l'Autriche-Hongrie & la Russie. Que d'efforts consentis, que de braves hommes tombés, que de capitaux partis en fumée... Une débauche de manoeuvres pour si peu de résultats, avec un front qui n'évolue que très peu. Monseigneur Albin Dunajewski, prince-évêque de Cracovie, ne sait jamais quelle fanfare il va saluer en ouvrant les volets de son palais épiscopal. Depuis le début de la guerre, Cracovie change de drapeau à toutes les saisons. Mis à part ce détail, la ligne de front stagne & Cracovie souffre car, depuis cent jours, la ville est bombardée quotidiennement pendant huit ou neuf heures de suite. La pluie de projectiles explosifs est si drue, que nous tenons d'un voyageur échappé du siège, qu'en traversant la place du marché, il s'est vu cinq fois chercher un abri sous les arches des maisons & des ateliers. Sur la colline du Wawel, qui domine la Vistule, la cathédrale Saints-Stanislas-&-Venceslas est brûlée, toute la toiture est détruite, la grande rosace n'a plus de vitraux & la flèche est fortement avariée. Le château & la bibliothèque ne sont plus qu'un monceau de cendres. En contre-bas, l'hôpital n'a pas été respecté & l'on ne vous parle même pas des faubourgs qui sont impitoyablement détruits. L'évêque a voulu tenter une démarche pour obtenir la cessation des bombardements. Devant le refus des militaires, il a demandé l'autorisation de faire sortir les femmes & les enfants. Cela aussi a été refusé. Les pertes sont sévères, surtout pour les Russes, qui ont reçu pour ordre de ne pas reculer d'un pas.
- Le drapeau à l'aigle bicéphale flotte fièrement -
A Vienne, le carrosse de l'Empereur François-Joseph est salué par les citoyens, qui veulent honorer la détermination du souverain. Pourtant, les renseignements qui arrivent de toutes parts suffisent à montrer que la bataille de Ruthénie - la région des Carpathes au-delà de Tarnopol, peuplées principalement de Slaves - a glorieusement débuté pour les Russes. A l'inspection de la carte & des mouvements orchestrés, on retrouve dans la manoeuvre du général Roman Kondratenko, le souhait de faire craquer l'armée austro-hongroise. Et, pendant que Lemberg tient bon sous les coups de boutoir de la quatrième armée, les corps légers russes parviennent, selon une tactique dite des abeilles, à harceler puis annihiler la dixième armée. Toutefois, le Baron Josip Filipovic prouve sa ténacité & use de la science stratégique la plus consommée pour renverser la situation. Malgré un engagement notable & opiniâtre, les Russes doivent soudain suspendre leur marche & concentrer toutes leurs forces pour tenir les ruines de Tarnopol. Depuis Klausenburg, l'idyllique chef-lieu de la Transylvanie planté au milieu de belles forêts, les renforts affluent. Le Baron Filipovic en profite pour lancer une seconde contre-attaque & parvient à faire reculer les corps ennemis & à en éliminer deux. Tarnopol redevient la propriété des Habsbourg. Les Viennois peuvent lancer leurs vivats.
- Dieu protège le Tsar -
Boje Tsaraya Khrani, que l'on peut traduire par Dieu protège le Tsar, est l'hymne de l'empire des Romanov & est joué dans toutes les grandes villes de l'empire. La propagande du Tsar est indispensable, car les pertes, nous l'avons déjà écrit, sont effroyables dans les rangs russes. Ayant embrassé d'un coup d'oeil les péripéties des dernières semaines & de la longue liste de combats, l'état-major du Grand Duc Vladimir déplore encore la perte de deux armées & de quatre corps d'armées écrasés cette saison. C'est effrayant. Voilà pourquoi Alexandre III a prononcé un vibrant discours. Un correspondant du journal L'Illustration en a été le témoin. « Les accusations de Rome raisonnent comme une fin sans gloire qui attend le Roi d'Italie & son allié déclaré de Vienne. Ainsi, l'Italie ne fait que corroborer le sujet exact du conflit qui a lieu actuellement : nous combattons les puissances malfaisantes, qui répandent le désordre, puis en accusent les autres. Nous pourfendrons toutes les puissances bellicistes, afin qu'une nouvelle ère de paix domine le monde entier. Passant par la guerre, la Sainte Russie imposera la paix & je ne doute pas que la majorité des nations de ce monde l'entendent comme nous. »
- Deutschland über alles -
Les Allemands ont vécu sous une grande ivresse de ciel bleu & découvrent soudain les affres de l'orage guerrier. Car, en Allemagne, on sait ce que signifie un ordre de mobilisation générale. Sept armées sont levées & l'hymne retentit avec fracas, lorsque le Kaiser annonce au Monde que le Reich déclare la guerre à l'Autriche-Hongrie. Un comble, lorsque l'on connait l'histoire de cet hymne. Que ceux qui n'ont jamais entendu l'hymne impérial de l'Autriche-Hongrie se précipitent pour l'écouter. Ils seront surpris. Toutefois, une lueur d'espoir brille encore, puisque de Berlin, on émet une vive clameur. Voici le rapport du Ministère des Affaires Etrangères, édité dans tous les journaux d'Allemagne : « La guerre austro-russe a mis le Monde & l'Europe en péril. Il est temps de rétablir la paix & l'équilibre sur notre continent. Nous invitons les représentants de la Russie & de l'Autriche à une négociation de paix, à Stettin. »
- Le trou béant de Bohême -
Notons qu'en cet automne, le réseau ferroviaire autrichien a été particulièrement perturbé. Ce qui n'a pas été le cas du rail allemand, qui s'est avéré vital pour les manoeuvres des troupes nationales, mais aussi alliées. Le maréchal Iossif Romeïko-Gurko, gouverneur de Varsovie, a reçu l'injonction d'utiliser les trains d'Allemagne, pour ouvrir un nouveau front en Bohême. La manoeuvre est exécutée avec brio & ponctualité, ce qui a médusé les défenseurs de Prague. D'ailleurs, si une grande harmonie semble régner entre Autrichiens & Italiens, l'impétuosité irrésistible de ces derniers va assurer à l'Empereur François-Joseph le temps de réorganiser ses arrières. Devant Prague, les Russes engagent deux armées & un corps, plus du double des divisions italiennes. Le général Enrico Cosenz n'en a cure, fait aussitôt usage de sa redoutable artillerie & lance même des attaques ciblées pour faire mordre la poussière aux envahisseurs. Cependant, ses divisions ne peuvent, à elles seules, refouler les forces énormes qui les accablent. Tel un Léonidas des temps modernes, le général italien préfère tenir jusqu'au dernier coup de feu, plutôt que de reculer ou se rendre. Blessé lors de l'assaut final des Russes, Cosenz tombe dans l'aphasie & la prostration. On le ramène au bercail, à Venise, on l'assied dans un divan & on permet à certains de l'approcher, comme si c'était le fossile d'un héros antique. Toute son armée est anéantie, Prague est occupée par les Russes. La route de Vienne est grande ouverte.
- Deuxième round en Méditerranée -
Le Tsar de Russie & le Kaiser d'Autriche-Hongrie ne cessent de régler leurs comptes & se retrouvent nez à nez en Méditerranée, lorsque la flotte autrichienne arrive au large des côtes égyptiennes. C'est à ce moment que surgit du canal de Suez & de la rade de Port-Saïd la grande flotte russe. D'égales forces, les deux formations se canonnent sans pitié. La bataille se déroule en ordre rapproché & les navires autrichiens concentrent leur feu dévastateur sur le navire amiral de la seconde escadre russe. L'amiral Zinovi Rojestvenski riposte en faisant passer ses torpilleurs de bâbord à tribord, mais ne parvient pas à infliger de dommages significatifs. La victoire revient clairement aux Autrichiens, qui déplorent moins de pertes. Voilà un retournement de situation radical, car la marine russe passe résolument du rôle de prédateur à celui de gibier. Leur chasse manquée en Mer Rouge, leur défaite en Méditerranée & le verrou posé par le Sultan dans le Bosphore, changent la donne.
- God save the Queen -
Les brumes & les vapeurs sont habituelles en Angleterre, mais elles sont l'écran idéal des apparitions. Le gouvernement de Sa Majesté déclare officiellement la guerre à l'Italie en raison de l'attitude peu respectueuse des Transalpins & ce, depuis des années. Les manoeuvres douteuses en Egypte & au Soudan, le soutien aux révoltés d'Ecosse, l'agression du Transvaal, le rôle très confus lors des affaires d'espionnage, tous ces désagréments ont irrité la couronne britannique, qui décide d'intervenir militairement. En Afrique, les troupes se placent face au Mozambique italien. En Europe, l'armée victorienne débarque en Allemagne. A ce sujet, les troupes britanniques envoyées sur le continent européen, impressionnent fort. La discipline des soldats, l'uniforme des officiers, l'armement ultra moderne & même le couvre-chef remplacé par un casque d'acier épatent les passants & les journalistes présents dans le port de Hambourg ou dans les gares de la Suisse. Avec l'armée de Sa Majesté, on entre dans le domaine de l'inédit, sans même s'attarder sur le parc d'artillerie, hors norme. Voici les Italiens prévenus.
- L'Italie accablée -
Nous avons la certitude qu'hier, lundi, le ministre de la Marine a reçu communication d'une dépêche venant de Reykjavik & télégraphiée par un de ses commettants à l'une des plus importantes maisons de commerce de Rome. Si alarmante qu'elle puisse paraître, nous considérons comme un devoir d'en donner la teneur exacte. Un soir de mortes-eaux, à marée basse, le commodore Winfield Scott Schley entame les hostilités & parvient à détruire les croiseurs de l'escadre italienne. Les vagues, telles les mâchoires de la mort, grignotent le dernier navire qui coule à pic. Ce sont les Russes qui veulent achever le travail en débarquant un corps d'infanterie pour prendre Reykjavik. Mais, une fois de plus, le soldat italien prouve sa valeur au combat & repousse l'assaut. Néanmoins, Reykjavik est bloquée par la mer & assiégée par la terre. Plus aucun renfort ne peut être envisagé, ce qui risque de démoraliser la garnison. A Rome, la presse ne s'attarde guère sur ces événements & préfère relayer un message gouvernemental. « Nous déplorons l’attitude de l’Espagne envers son allié français. Le pacte de non-agression à été rompu. Nous comprenons les choix espagnols afin de préserver les brides de son empire face à la pression américaine. Néanmoins, nous ne pouvons accepter cette attitude. Nous demandons donc à l’Espagne de cesser ce combat fratricide afin d’éviter une escalade dans le conflit. »
- Guerre générale en Asie -
De l'autre côté du Monde, les oreilles du dragon mandarin sont fines. Et, dans les colonnes du journal L'Illustration, il est de notoriété publique que le directeur de la rédaction accepte les articles des correspondants établis sur place. Ils peuvent ainsi nous offrir une vision plus juste de certaines situations complexes. Le professeur Cornelius Sluitspier, un collaborateur hollandais, dont les lecteurs ont déjà pu suivre les émouvants récits avec un sympathique intérêt, nous explique combien il est difficile pour l'armée batave de chasser les Français de Bangkok. Selon les témoignages recueillis, l'Infanterie de Marine du général Brière de l'Isle s'est signalée par des prodiges de valeur & d'adresse en transformant l'offensive hollandaise en un fiasco retentissant. Les Hollandais doivent effectuer un recul & doivent réorganiser leurs unités, afin d'espérer engranger enfin un succès.
- La prise de Hué -
Mais il est une ombre à ce tableau ; l'Empereur Mutsu-Hito exige la victoire totale de ses couleurs à Hué, qui n'a que trop résisté contre les hésitations coupables de l'armée chinoise. Des informations importantes sur les mouvements opérés par les unités adverses seraient parvenues ce matin à Paris. D'innombrables divisions ont été envoyées vers Hué, dans le but d'écraser une bonne fois pour toutes la présence française en Annam. Le colonel d'Esclevin est pourtant un homme de principe & un brillant officier. Lorsqu'il reçoit l'ordre de réaliser une sortie pour mener un raid contre les Japonais qui menacent le Cambodge, il choisit de se retrancher dans Hué, car l'ennemi, justement, change de plan & attaque la citadelle de l'Annam. Et, quand on parle de retranchement, pour un officier français, c'est du sérieux ; l'ennemi s'en rend vite compte, en observant les offensives sanglantes & les pertes consternantes qui s'ensuivent. Les Marsouins français sont stoïques & bien abrités lors des bombardements, infranchissables & redoutables lors de assauts périlleux. Les rangs nippons sont balayés, mais ne cessent jamais de revenir, comme les vagues du ressac. A la fin du mois de novembre, le pavillon de l'Empereur du Japon est hissé haut, symbole d'une victoire décisive & de l'anéantissement du corps du colonel d'Esclevin. C'est à ce moment, que l'armée chinoise arrive sur les lieux, lente & inutile. Ce sont les Japonais qui ont tout fait.
- Convention de Constantinople -
Le soleil se couche derrière la tour de Léandre, dans le Bosphore & offre un ciel vaporeux, comme le miroir de l'action d'Abdul Hamid II, qui reste un souverain ombrageux & complexe. D'ailleurs, l'impact du Sultan de Constantinople au niveau politique est, certes, non négligeable, mais il faut admettre dans ces colonnes que le doux farniente du corps diplomatique ottoman est notoire. Les idées fusent, mais les projets philanthropiques ou internationaux entrent rarement dans le monde du concret. L'illustration de cette manière de faire, que certains consuls comparent à la course d'une poule sans tête, est la fameuse Convention de Constantinople. Au départ, l'idée de régler la gestion du canal de Suez est venue d'un esprit sain & convainquant, pour faire bouger les instances britanniques & ottomanes. Mais, alors que de nombreuses nations se sont montrées favorables, la convention est véritablement en vacance. La République Française, qui espérait étendre la belle idée à d'autres passages interocéaniques, tel le canal de Panama, se désole de l'oisiveté turque.
- Lettre ouverte du Président Cleveland -
A Washington, la presse riposte à boulets rouges sur les déclarations italiennes de l'été & édite cette lettre ouverte de la Maison Blanche : « Le Président Cleveland a beaucoup ri en lisant les dernières déclarations du roitelet d’Italie. Et de lui répondre, cigare à la main, lors d’une interview dans le New York Times. Les dernières déclarations italiennes ont eu la délicate attention de détendre bien du monde à Washington, jusqu’à faire rire à l’unisson les membres du Congrès, réunis au Capitole. Les allégations du souverain d’Italie, Monsieur Umberto de Savoie, ne font que renforcer toute la détermination des Etats-Unis à en finir avec les agissements italiens partout où le royaume d’Italie représente un danger et une nuisance aux intérêts américains. Les calomnies dans la presse sont suicidaires & illustrent à merveille une politique impérialiste hasardeuse et vouée à l’échec. Les massacres en Sicile & en Sardaigne ne font qu’illustrer toute la brutalité d’un régime incapable de se maintenir dans l’état de droit. Et de conclure : Monsieur Umberto de Savoie, il est grand temps que vous abdiquiez ! ».
- Carnets coloniaux -
Le général Kölemen Abdullah Pacha poursuit sa promenade en Afrique & termine son voyage géographique par le Kenya & la vallée du Grand Rift. Cette contrée sauvage & mal connue offre un spectacle éblouissant, aussi bien de la faune - partout des troupeaux d'éléphants, des girafes, des zèbres - que de la flore dominée par les baobabs, les acacias & les bambous. Arrivés au bord du lac Naivasha à la fin du mois de novembre, les Turcs peuvent contempler & mesurer l'énorme masse déchiquetée du Mont Kenya, l'un des plus hauts sommets du continent africain. En parallèle, ils contraignent les Kikuyus à accepter la suzeraineté du Sultan de Constantinople.
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Au Transvaal, fusil en bandoulière, les Italiens poursuivent leur marche à travers un paysage à couper le souffle, physiquement parlant. Au-delà de Johannesburg, la végétation est de plus en plus dépouillée, le relief de plus en plus tourmenté. Les soldats doivent davantage utiliser leurs armes pour chasser les lions que les Boers, car ces derniers sont en pleine retraite depuis l'affrontement de l'été. Le général Baldissera est conscient que l'adversaire va finalement surgir avec des renforts & cela se produit dès le jour de l'Equinoxe. Mais on assiste, il faut l'avouer, à des actes d'héroïsme individuels, dans un manque complet d'action d'ensemble. Dès lors, le corps italien attire à lui toutes les forces disponibles des Boers, dont il doit supporter le poids pendant toute la journée du 23 septembre. Dès le lendemain matin, Baldissera doit ordonner la retraite, car les Boers sont plus nombreux que prévus & bien armés.
- L'appât du Niagara -
Une rencontre tragique s'est déroulée dans le plus bel hôtel du site des chutes du Niagara, juste à la frontière canadienne. Mais, plutôt que de rencontre, on devrait parler de traquenard. En effet, une belle espionne nommée Faustina, venue du Canada, est parvenue à séduire un ressortissant américain, lors d'un séjour étrange. Ce séjour a commencé par la visite des chutes & par l'examen de l'incroyable Musée des chutes du Niagara, qui rassemble pour le bonheur des gens, des curiosités, des soit disant monstres de la nature & une momie égyptienne bien intrigante, trouvée par les frères Abd el-Rasul dans la fameuse cache de Deir el-Bahari, vendue au Caire & acheminée Dieu sait comment en Amérique du Nord. Mais cette momie - qui se révèlera être celle du Roi Ramsès Ier (c'est absolument véridique) & donc rendue aux autorités égyptiennes - est moins importante que le contenu du télégramme envoyé par le quidam américain. Faustina n'est même pas capturée, mais carrément abattue par un sniper inconnu. Gageons que les services engagés aient récoltés les renseignements souhaités.
- Développements urbains -
Au pays du Soleil levant, la population devient de plus en plus citadine. Mais les campagnes ne se vident pas. C'est tout simplement le résultat d'une politique de natalité & d'une nouvelle hygiène de vie en milieu urbain, qui engendre un tel essor. Dans la périphérie proche de Tokyo & de l'autre côté de la baie éponyme, la désignation de Yokohama au statut de grande métropole illustre cet accroissement spectaculaire. Malgré la guerre, les Japonais grouillent dans leurs villes portuaires, comme des grenouilles au bord d'une mare. Le Prince Hirobumi peut bomber le torse face aux musiciens qui entonnent le Kimi Ga Yo, l'hymne impérial du Japon.
Les Turcs, eux, s'investissent de plus en plus sur le continent africain, puisqu'ils font du village de Kampala, non loin du lac Victoria, une ville majeure digne de figurer dans les atlas. Kampala signifie les "collines des antilopes impalas" & l'une d'elle sert pour le Roi indigène Mwanga, tandis qu'une autre accueille le nouveau palais du gouverneur ottoman, une troisième étant réservée pour la construction d'une mosquée.
Les Belges travaillant pour l'Etat Indépendant du Congo investissent massivement pour faire de ce pays une nation moderne. En conséquence, Stanleyville & Luluabourg deviennent des cités majeures & l'une d'elles est même reliée par le chemin de fer. Ce développement extraordinaire fait de ce pays l'égal du royaume de Belgique.
- Deux étoiles de plus pour la bannière américaine -
Aux premières lueurs de l'aube la cavalerie américaine bat les plaines & les premiers reliefs des Black Hills & des Rocky Mountains. Elle fait bien, car Sitting Bull continue de hanter les nuits des pontes du Congrès & écrit le dernier acte des guerres indiennes. Dans les semaines qui suivent, six cents Lakotas périssent sous les rafales des canons Hotchkiss & des mitrailleuses Gatling du sixième régiment de cavalerie. Il ne reste aux irréductibles qu'à s'exiler au Canada. L'année 1890 voit donc l'abolition de "la frontière", cette ligne du Far West qui délimitait les territoires mal connus & peuplés d'Indiens. Désormais, deux nouveaux Etats sont intégrés dans l'Union, le Wyoming & l'Idaho.
- Ponts & Chaussées -
Les ouvriers turcs terminent le triangle ferroviaire balkanique en reliant Sofia à Bucarest. Ce sont les seuls qui s'activent dans ce domaine, ayant du retard sur les autres nations ou profitant tout simplement de la paix préservée dans cette région.
Les Belges agrandissent le port d'Anvers & donnent ainsi à leur compagnie de navigation plus d'importance. Eux aussi se prélassent dans un climat de paix que peu de nations goûtent en ce moment.
Les Japonais sont les plus surprenants car, en dépit de la guerre contre la France - dans laquelle ils sont le véritable fer de lance - ils parviennent à agrandir leurs villes , mais aussi à se préoccuper de la bonne tenue de leur compagnie maritime civile.
- Mécontentements en vrac -
Singapour se révolte contre le pouvoir de Pékin, qui n'a d'ailleurs jamais mis un pied dans cette île. La région, tenue jadis par les Hollandais, est décidément instable, puisque Batavia sur l'île de Java, rejette à son tour l'autorité nipponne, à peine présente sur place, il faut bien l'avouer. Ces ambitieuses cités portuaires sonnent le réveil des peuples assujettis.
Sapporo retrouve un peu de sérénité & les soldats en profitent pour courir la gueuse dans le quartier chaud pacifié. Une fois de plus, l'Empereur du Japon a été attentif & réactif, malgré la guerre qui accapare les esprits.
A l'inverse, la situation devient catastrophique au Mexique, où la province de Merida est hors de contrôle. Le Président Diaz, préférant visiter l'Europe, & en particulier la douce Alsace, ne semble pas prendre la mesure de l'intensité de la colère qui gronde dans le Yucatan. La ville de Merida n'envoie plus de revenus & devient la capitale d'un mouvement révolutionnaire.
La colonie d'Alger est le théâtre de violents soubresauts visant la France occupante. Tunis, sa voisine, est aussi le lieu des contestations envers la métropole italienne, cette fois. L'armée est vivement souhaitée. En Corse, la population s'en prend aux Hollandais.
- Liste des Consortiums -
Alimentaire : Abyssinie (AUTRICHE), Argentine, BELGIQUE, Ceylan (ROYAUME UNI), CHINE, ESPAGNE, ITALIE, MEXIQUE, TURQUIE.
Armement : ALLEMAGNE, AUTRICHE, BELGIQUE, CHINE, ESPAGNE, FRANCE, ROYAUME UNI, RUSSIE, Suède.
Banque : AUTRICHE, BELGIQUE, FRANCE, JAPON, ROYAUME UNI, Suisse (ALLEMAGNE).
Chantier naval : BELGIQUE, ESPAGNE, Grèce, JAPON, MEXIQUE, ROYAUME UNI.
Charbonnage : ALLEMAGNE, BELGIQUE, ETATS-UNIS, Mandchourie (CHINE), Mozambique (ITALIE).
Chimie : ALLEMAGNE, BELGIQUE, JAPON, Norvège, ROYAUME UNI.
Gisements : Brésil, Congo (BELGIQUE), Etats Malais (PAYS-BAS), Matebeleland (ROYAUME UNI), Nigeria (ALLEMAGNE), RUSSIE.
Machines outils : BELGIQUE, Danemark, ITALIE, JAPON, PAYS-BAS, ROYAUME UNI, RUSSIE.
Mines : Australie, Côte d'Or (ESPAGNE), Katanga (BELGIQUE), MEXIQUE, RUSSIE, Transvaal.
Pétrole : Azerbaïdjan (RUSSIE), BELGIQUE, Birmanie (PAYS-BAS), ETATS-UNIS, Roumanie, ROYAUME UNI, Sumatra (PAYS-BAS).
Sidérurgie : BELGIQUE, ESPAGNE, JAPON, MEXIQUE, ROYAUME UNI.
Tabac : Barbade (ROYAUME UNI), BELGIQUE, Cuba (ESPAGNE), JAPON, MEXIQUE, Nicaragua, TURQUIE.
Textile : AUTRICHE, BELGIQUE, Corée (JAPON), Egypte (TURQUIE), Gujarat (ROYAUME UNI), Maroc (FRANCE), Pendjab (ROYAUME UNI).
Verrerie : AUTRICHE, BELGIQUE, Canada, CHINE, FRANCE, JAPON, Perse.
DATE LIMITE DE L'HIVER 1890-1891 : VENDREDI 20 SEPTEMBRE
La Conférence de Berlin a réuni cet hiver plusieurs comités internationaux, à l'initiative du Prince Otto von...
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